La définition énoncée par Aristote dans sa
Poétique – postérieure d'un siècle à l'âge d'or de la tragédie grecque – a
laissé son empreinte chez la plupart des auteurs tragiques : « La tragédie est
l'imitation (mimêsis) d'une action de caractère élevé et complète, d'une
certaine étendue, dans un langage relevé d'assaisonnements d'une espèce particulière
suivant les diverses parties, imitation qui est faite par des personnages en
action et non au moyen d'un récit, et qui, suscitant pitié et crainte, opère la
purgation (catharsis) propre à pareilles émotions. »
Aristote, réfléchissant sur la fiction, c'est-à-dire
sur la meilleure manière de raconter des histoires de bonheur et de malheur qui
ressemblent à celles que vivent les hommes, cherche à dégager des pièces de
Sophocle et d'Euripide les principes rationnels d'une œuvre réussie. Dès lors,
il fait de la tragédie le plus codifié de tous les genres littéraires. Ainsi, à
partir de la Renaissance, ces principes deviennent normatifs : les œuvres de
l'Antiquité étant devenues les critères absolus du beau, la Poétique d'Aristote
(complétée par quelques remarques d'Horace concernant le théâtre, dans son Art
poétique) est considérée comme un énoncé des règles dont il est interdit de
s'éloigner.
L'action consiste le plus souvent en un
conflit qui oppose l'homme à des principes moraux ou religieux supérieurs. Ce
conflit est l'occasion d'un dialogue entre l'homme et ce qui le dépasse, comme
avec lui-même. Parfois, le tragique se confond avec des dénouements sanglants
et des sacrifices mortels. Mais la tragédie dit aussi l'espoir de l'homme
debout, qui lance un défi à un monde difficile à déchiffrer ou à une injustice
divine, de l'homme qui se confronte aux lois de la cité et présume parfois de
ses forces. La conception du genre reste à peu près immuable pendant plus de
vingt siècles. Et si, au xviie s., les apports des dramaturges français ont
modifié radicalement l'esthétique de la tragédie, cela n'a pas empêché les
auteurs de se référer sans cesse aux mêmes éléments techniques qui constituent
le genre, ni de considérer que la formule admettait des variations qui, précisément,
ne la remettaient pas en cause.
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